Après leur élimination en quarts de finale de la CAN 2023 par la Côte d’Ivoire ce samedi 03 février 2024 au stade de Bouaké, le sélectionneur du Mali Eric Chelle déclare que leur adversaire a été aidé par « la chance ». Après la rencontre, ICI1FO.COM a arraché quelques mots à l’entraîneur des Aigles du Mali.
J’aimerais avoir votre ressenti, bien entendu, après ce match et cette élimination.
C’est très, très, très difficile à encaisser. Après, nous avons été capables de faire un bon match. Par moments, c’était un grand match. Puis, ça a un petit peu écroulé dans les dernières minutes. Après, c’est vrai que l’arbitre nous a bien aidés aussi. Je l’avais dit en conférence de presse, j’espère que ça ne va pas se jouer sur des referees. Mais il faut constater que oui. Après, nous avons décidé de passer sur un système à cinq à la fin pour être plus solide sur le jeu aérien. Parce qu’en face, il y a énormément de qualité dans le jeu aérien. Et on a perdu pied sur les cinq dernières minutes. Donc, énormément déçu pour mes joueurs. Cette génération mérite quand même quelque chose. Au niveau de la qualité du jeu, je pense qu’il n’y a pas beaucoup d’équipes qui sont capables de faire ce qu’on fait.
Quand vous dites dans ce match, vous avez eu un pénalty que vous avez raté. Il y a eu deux cartons rouges. Pratiquement, la Côte d’Ivoire va jouer les deux genoux à terre vers la fin du match. Et vous parlez de l’arbitrage. Est-ce que vous n’êtes pas un mauvais perdant ?
Bien sûr que je suis un mauvais perdant. Ce qu’il y a de bien dans le football, c’est qu’il peut toujours se passer quelque chose. Moi, j’ai pris la partie de donner comme objectif à mes joueurs de bien jouer pour gagner. Donc, je pense qu’on a développé du jeu. Des actions très intéressantes. Sur deux pénaltys, il y en a un qui a été sifflé. Moi, j’ai mon joueur Kiki. Il y a pas longtemps, Kiki veut faire une tête et le ballon lui retombe sur la main. Et on sifle le pénalty. Donc, il faudra qu’on m’explique quelle est vraiment la règle des mains. Ça, c’est la première. La deuxième, le carton rouge, il est mérité. Puisque j’ai mon joueur qui part tout seul au but. Qui fait un crochet. Et annihilation d’occasion de but. Derrière, je le répète, parce que je l’ai déjà dit en conférence de presse. En intervention flash, il fallait qu’on soit beaucoup plus solide. L’arbitre ne nous a pas aidé à être moins solide. Mais aussi, c’est vrai qu’il y a des fautes qui, comme par hasard, dans les 5-10 dernières minutes du match, il y a des fautes qui sont litigieuses. Maintenant, il faut qu’on soit beaucoup plus solide sur ce phase arrêtée. Je le répète, on savait que c’était une force de la Côte d’Ivoire.
Après votre victoire face au Burkina Faso, je vous avais posé la question sur l’irrationalité du football. Vous aviez raconté une anecdote. Est-ce que ce soir, après ce match face à la Côte d’Ivoire, vous revivez une sorte de forme d’irrationalité dans le foot pour ce match ?
Pour le spectacle, je pense qu’il y a beaucoup de monde qui ont pris du plaisir à regarder ce match. Pour nous, c’est un peu un passage dans la quatrième dimension. Dans 75 minutes, tu te dis qu’il ne peut rien t’arriver. Et puis, à un moment donné, il y a quelque chose qui se passe et tu perds un petit peu de pied. Même si on a fait preuve de caractère, je pense que dans le jeu, comme vous dites, un 10 contre 11, ça n’a pas été suffisant. On a manqué de lignes directrices dans le jeu. On n’a pas mis assez de centres. On n’était pas assez dans la surface de réparation. Et on n’a pas été à l’abri des contres de la Côte d’Ivoire, et notamment de la très bonne rentrée de Diakité.
Quoi qu’il en soit, vous ne pensez pas aujourd’hui que vous avez fait un coaching désastreux, qui a déstabilisé toute l’équipe malienne. Est-ce que vers la fin du jeu, vous avez fait sortir vos joueurs offensifs pour renforcer votre défense, au lieu de chercher à attaquer, bloquer le deuxième but et tuer le match ?
Comme je l’ai dit avant… C’est de bonnes questions, ça. Comme je l’ai dit avant, on a pris la partie dans les cinq dix dernières minutes de jouer à cinq. Parce qu’on voyait qu’on était en difficulté sur du jeu aérien. Donc on a voulu renforcer l’axe central. Et pour renforcer l’axe, il faut sortir des joueurs. Lassine était très touché, je pense, sur le point physique. Et puis après, si ça avait marché, on lui aurait dit que c’était un beau coaching. Là, ça n’a pas marché. Encore une fois, comme je l’ai dit, on n’a pas été bons sur ces phases arrêtées. Maintenant, si ça te plaît de dire que c’est moi qui ai fait un mauvais coaching, il n’y a pas de souci. Tu penses ce que tu veux et tu dis ce que tu veux.
J’ai l’impression que le scénario de 2019 s’est répété. C’est-à-dire, Mali, Côte d’Ivoire, huitième de finale. Le Mali joue, c’est la Côte d’Ivoire qui gagne. Cette année encore, le Mali joue, c’est la Côte d’Ivoire qui gagne. Est-ce que vous, en tant que sélectionneur, avez-vous tiré des enseignements de l’édition 2019 pour préparer ce match ? Même si il est vrai que vous n’étiez pas là en 2019.
Je pense quand même que sur ce match de 2024, il y avait une qualité de jeu un peu meilleure. Maintenant, comme tu l’as dit, c’est vrai que sur ces deux matchs, le Mali, on gagne au point. Mais à la fin, on perd le match. Maintenant, comme je le disais tout à l’heure en interview, il y a un bilan qui va être fait. Les joueurs, au niveau des joueurs, au niveau du staff. Ensuite, il y a un bilan qui va être fait avec la fédération. Pour essayer d’analyser ce tournoi, qu’est-ce qui a été, qu’est-ce qui n’a pas été. Et puis après, on discutera tous très tranquillement pour voir de quoi l’avenir est fait.
À propos du match face au Burkina Faso, vous disiez que le football n’a rien d’exact. Il n’est pas une science exacte. Je me demandais que la Côte d’Ivoire a toujours été un gros morceau pour le Mali. Et vous me disiez que la vérité n’est pas forcément celle d’aujourd’hui. Après ce match, est-ce que vraiment vous croyez… Entre la Côte d’Ivoire et le Mali, l’histoire n’a pas été inversée. Il y a des choses qu’on ne peut pas changer. C’est ce que je peux dire.
Encore une fois, comme je le disais tout à l’heure, vous pensez ce que vous voulez. Maintenant, j’aimerais bien voir ce match-là à Bamako avec 50 000 spectateurs. Voir le contexte dans lequel évoluerait l’équipe de la Côte d’Ivoire. Comme vous êtes capable, en Côte d’Ivoire ici, avec un stade plein, de sortir une qualité de jeu et de faire en sorte que la Côte d’Ivoire n’existe pas pendant 75 minutes. Après, c’est le football. Aujourd’hui, je dois encaisser. Vous avez raison, j’ai tort. Aujourd’hui, je dois encaisser. Si Dieu me permet d’être encore à la tête de cette équipe, la Côte d’Ivoire sera un objectif pour moi.
Je voulais savoir, coach, est-ce que vous n’avez pas manqué de l’audace ce soir ? Parce qu’on avait ce plan de jeu. La pratique vient à vous reprocher, sauf qu’à la fin, c’est la Côte d’Ivoire qui gagne.
Comme je viens de le répéter, à la 80e, en voyant que la Côte d’Ivoire commençait à allonger, à faire du jeu long, et qu’on a vu qu’on était un petit peu en difficulté, on a décidé de faire rentrer un défenseur pour être dans une défense à 5 et pour être en surnom contre les deux attaquants. Maintenant, on a pêché. Je ne sais pas si c’est de l’audace. Si ça avait marché, on aurait dit « Eric, tu as fait quoi de l’audace ? » Là, ça n’a pas marché. Comme je le répète, il faut que j’encaisse, que mes joueurs encaissent. Et puis, on doit analyser tout ça pour progresser. Encore une fois, je le répète, Eric Sékou Chelle, c’est une chose, mais les entraîneurs sont là et partent, et les joueurs sont là aussi et partent. Le Mali reste, l’équipe nationale reste. Certains joueurs vont être assez forts mentalement pour continuer, il y en a d’autres qui seront peut-être moins forts. Aujourd’hui, on va analyser tout ça et faire un bilan. Mais je ne pense pas qu’on a moqué d’audace.
Au fait, le public malien voudrait bien faire la fête ce soir, mais vous les avez plongés dans un sommeil forcé. Quel est votre message à leur endroit ? C’est le public qui était là, malgré tout ce que le pays connaît. Il vous a soutenus, comme la presse sportive malienne aussi, les supporters maliens. Maintenant, si Dieu décide que vous restez ou que vous partez, nous voudrions bien entendre un message à leur endroit.
Comme je l’ai dit, j’étais déçu pour mes joueurs, mais je l’ai dit aussi en interview flash, j’étais déçu pour le Mali, pour les Maliens. Je pense que j’ai toujours respecté tout le monde, que ce soit les Maliens, que ce soit les joueurs de l’équipe nationale, que ce soit les journalistes. Des fois, j’ai fait des erreurs. J’ai fait des erreurs. Vous avez peut-être pris des choses mal, donc je m’en excuse. Maintenant, je ne vais pas m’excuser parce qu’on a perdu. On est tombé sur une équipe qui a eu la chance de nous gagner. Nous, on a joué à 100%. Les joueurs se sont arrachés. On a eu une qualité de jeu certaine.
Maintenant, je suis déçu pour mes joueurs, je suis déçu pour vous, parce que vous méritez mieux. La presse sportive malienne mérite mieux. Je suis déçu pour le Mali, comme tu viens de le dire, parce qu’on est dans une situation compliquée et que ça pouvait faire du bien. D’ailleurs, je leur en ai parlé dans ma causerie. C’est vrai que c’est un échec. Dans la vie, il faut savoir relever la tête et avancer. Le premier responsable, c’est moi. Je vais le répéter encore une fois. Je ne vais pas rentrer chez moi, je vais aller à Bamako. Je vais avoir une discussion avec la fédération, avec le ministère. On va voir ce qu’on fait.
À 11 contre 11, à la première mi-temps, le Mali maîtrisait le match. À 10 contre 11, on mène 1 à 0. Et le match finit de cette manière-là. Est-ce une faute professionnelle, ou est-ce un manque profond de caractère et de mental, ou est-ce une malédiction ?
On n’a jamais gagné, j’avoue. Je ne pense pas que ce soit une faute professionnelle. C’est une faute professionnelle, c’est-à-dire qu’on s’arrête de jouer, on court plus, et tout le monde veut sortir. Je pense que c’est plutôt… Je vais le répéter encore une fois, la qualité de la cote d’ivoire sur le jeu aérien, on n’a pas su répondre. 75e minute, on s’effondre un petit peu sur ce jeu aérien. Après, sur 10 contre 11, si vous connaissez le foot, vous savez que des fois, une équipe qui a 10, et même souvent, son état d’esprit est décuplé. Même s’ils sont un joueur en moins, ils ont cette envie de s’accrocher.
La vérité, c’est que la Côte d’Ivoire, ils reviennent de très loin. Aujourd’hui, ils sont en demi-finale. Ils ont cette énergie, ils ont aussi, ce qu’il y a de fou dans le foot, c’est ce petit brin de chance. Ils ont des qualités, ils méritent cette demi-finale sur leur qualité. Maintenant, nous, on l’a mérité aussi. Je ne sais pas si c’est une malédiction. De qui elle viendrait, cette malédiction ? Je ne sais pas. Aujourd’hui, mon sentiment, c’est de la déception. De la déception, encore une fois, pour mes joueurs. De la déception pour toi et tes confrères. De la déception pour le Mali. Et encore une fois, je vais le répéter, c’est moi le premier responsable. Ce n’est pas vous, ce n’est pas toi. C’est moi le premier responsable. J’ai fait des choix. Je vais les assumer. On se retrouva dans une petite dizaine de jours à Bamako. Et puis, on verra ce qu’on décide de faire tous ensemble.
Diakité Mala depuis le stade de Bouaké pour ICI1FO